Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Paroles Plurielles
9 décembre 2005

Radiola (Phil)

Demain je n’irai pas à l’école. Pas envie. Non. D’abord je serai malade, j’aurai plein de fièvre, maman appellera le docteur, si ça se trouve j’aurai des boutons plein la figure, ça fera un drôle d’effet avec les étoiles de mon pyjama. Je resterai au lit, tiens. J’écouterai le poste. Je le poserai à plat sur l’oreiller, je poserai une oreille dessus, je mettrai le son au minimum, je tournerai les molettes pour trouver une station qui m’intéresse, qui parle de sport, de Roger Bambuck, par exemple. J’aime bien Roger Bambuck. Il est vachement fort, il gagne plein de courses, même contre des étrangers qui sont pas d’ici. Je tournerai les molettes et ça fera crouic crouic crouic, des bruits qui font mal aux oreilles, mais bon faut ce qui faut. C’est que ce n’est pas facile à trouver les stations qui parlent de Roger Bambuck. D’abord y en a plein où on fait qu’à entendre des chansons. J’aime pas les chansons, Antoine va te faire couper les cheveux et tous ces trucs idiots, ça m’énerve. Et pis y a plein de radios où ils causent même pas français, on n’y comprend rien. Je sais pas pourquoi ils font les malins, pourquoi ils peuvent pas parler français comme tout le monde.

Demain je n’irai pas à l’école. Des fois maman viendra me voir, pour savoir si tout va bien, je ferai semblant de dormir, j’enfouirai le poste sous mes draps et je fermerai les yeux. Maman ne veut pas que j’écoute la radio dans mon lit. Elle ne sait pas que j’ai encore piqué le vieux Radiola en plastique rouge et gris dans l’atelier de papa.

Demain je n’irai pas à l’école. Mais je ne suis pas malade, en fait. Et je n’ai pas envie d’être malade, pour de vrai, parce que quand on est malade on est tout mou, on tousse, on a froid et on transpire beaucoup. Et puis il y a la corvée du thermomètre. Imparable. Et avaler des médicaments vachement mauvais. Et manger seulement de la soupe. J’aime pas la soupe. Et puis il fera sûrement beau, demain, comme aujourd’hui. Avec Martial on pourra encore faire des glissades sur la glace des caniveaux. On pourra faire un détour par le bois du Mont Pipeau, pour repérer des coins à cabanes. Eh ! rigolez pas, ça s’appelle vraiment le Mont Pipeau, c’est la butte qui commence en face de chez nous, les petites rues sont vachement raides, et tout en haut il y a le château d’eau avec un petit bois tout autour. Après on courra pour rattraper le temps perdu. Parce qu’il ne faudra pas arriver en retard, j’ai pas envie d’avoir des lignes.

Finalement, je crois bien que demain…..    ben…. J’irai à l’école

Publicité
Commentaires
C
Phil...j'aime énormément ce texte, je l'ai lu avec de petites émotions<br /> Tu te mets à merveille dans la peau d'un enfant, se façon de parler (on croirait l'entendre!)<br /> (euh...je me demande si un enfant connaît le mot "imparable"<br /> remarque que s'il écoute Roger Bambuck, il a sûrement un riche vocabulaire...:-)))
Publicité