Funambule! (Coquelicot)

Tout rond, souriant, le visage du Funambule me fascinait. C'est à moi, et à moi seul, qu'il avait accepté d'enseigner son art.

Regarde, me disait-il, c'est facile!  Fais comme moi, lentement avance à pas glissés le long du câble. Sans peur, garde confiance, tu ne risques rien!  Fonde ton équilibre sur la longueur du balancier. Plus tu le porteras long, plus tu pourras prendre appui sur lui. C'est ça, doucement, trouve ta stabilité dans l'équilibre des forces contradictoires. N'aie pas peur du vide, c'est lui qui te porte! C'est sa présence qui donne sens, force, grandeur et beauté à ton geste.  Le câble est ton chemin, le bout du câble, ton but. Etre funambule sera ta vie! 

Moi, fasciné, je le regardais, je l'admirais. Plus rien n'existait autour de moi! Muet d'admiration et d'envie, j'étais seul au monde et, peu à peu, je le sentais, je devenais funambule. Roi de l'équilibre, j'étais seul au monde … au milieu de la foule bigarrée et bruyante réunie sous le grand chapiteau. J'avais dix ans!

Comments

[marie-jeanne]

C'est tellement bien écrit que l'on croirait que l'auteur est lui-même équilibriste pour avoir su si bien rendre les sensations.

[colette]

Le câble est ton chemin, le bout du câble ton but...
Quelle belle métaphore !
C'est vraiment très beau, Coquelicot!

[coumarine]

Je ne sais pas pourquoi, j'ai pensé en te lisant à "Neige" de Maxence Fermine
Vague souvenir de lecture d'un livre que j'ai adoré
Tu vois ce qui rend ce texte très réussi, c'est la phrase finale, qui fait choc, et lui donne tout son sens
(tiens, je pense à ton pseudo, à priori plus féminin que masculin...si tu as été me lire un peu, tu te seras rendu compte que les coqquelicots, je les aime...beaucoup)