La route à suivre (Pierre de Lune)
L'unique ascenseur de l'immeuble est en panne.
Je le découvre en déboulant dans le hall de cet immeuble où il vit. Et où, tant de fois, j'ai déposé les arabesques de notre lien.
Bien des jours ont coulé depuis notre dernière rencontre. Et pourtant ce sentiment, si vivace, qu'il m'attend. Qu'un geste, qu'un mot, suffirait.
Hésitation. Peur de faire ce premier pas et me dévoiler ainsi dans toute ma fragilité. Peur d'une porte close, d'un moment dans le néant. Absence et douleur. Et, à la fois, cette envie de le rejoindre…
Ce matin, j'ai donc enfilé mes bottes de sept lieues pour arriver ici. Couru, volé vers lui. Et là, ce carton. Froid, clair, tellement réel. "Hors d'usage".
Nique à la vie. Comme si l'amour demandait un mode d'emploi et une notice technique pour éclater!!!
Reste l'escalier de secours. Extérieur, bien sûr. Marches métalliques, ajourées, où le vide emplit tout le regard. Vertige. Et pourtant, je m'y engage. Cinq étages pas à pas. Une marche après l'autre.
Je tente d'évacuer toute pensée liée à ce malaise qui m'étouffe. Le vide… Ne pas m'arrêter. Monter. Encore et encore. Laisser s'envoler toute angoisse et me dire "avance". Encore et encore. Fixer la l'esprit sur l'après… L'après.
Cinquième… enfin. La porte métallique cède facilement sous la pression de ma main.
Le couloir est désert. L'unique fenêtre déverse un éclairage irisé. Le soleil, à son déclin, donne aux lieux une dimension relative et diaphane.
Je longe ces portes en enfilade. 57. 55. C'est là. Là que tout va se jouer ou se perdre. Définitivement.
Et sur cette porte, tant de fois franchie et tant de fois refermée, un carton. Immense.
Et sur ce carton, les mots de mes lendemains. La route à suivre, l'unique…
"Je t'attends".