Sinaï 67 (Hériçon)
J'ai presque une heure d'avance... Une heure qui a duré quarante ans c’est si peu à l’échelle de l’humanité.
Le Sinaï 1967 la déroute. Goliath avait décidé d’écraser David. Son armée, équipée de neuf avait lamentablement échoué dans le désert, dans un gigantesque fatras de matériel militaire abandonné.
De pauvres bougres partis la fleur au fusil, voyaient impuissants l’Horreur porter son regard sur eux. Dans leur fuite ils s’étaient déchaussés afin de courir encore plus vite.
Je revois cette scène ; à perte de vue par milliers, des chaussures neuves abandonnées dans le désert. Je sens encore la morsure du sol brûlant sous la plante de mes pieds. Ce jour là j’avais fait plus que fuir j’avais déserté. Je n’ai plus jamais porté d’uniforme.
Nos deux pays sont désormais en paix, c’est la plus belle des victoires. C’est un peu la mienne n’en déplaise à la cour martiale de l’époque.
Dans mes vingt années de prison, ils m’ont tout pris sauf mes rêves. C’est pour ça qu’aujourd’hui je suis là, « à l’ordre » dans un « garde à vous de la Paix ».
Si tous les soldats du monde, lorsqu’ils reçoivent l’ordre de partir en campagne pouvaient se rassembler et dans un défilé planétaire, déposer leurs armes, leur barda, leurs engins de mort.
Si tous les soldats du monde désertaient, quel grand pas ferait l’humanité !