Ebène sur ivoire (Pati)
Excuse-moi, c'est une erreur, dit le hérisson, en descendant penaud d'une brosse à cheveux.
Excuse-moi, c'est une erreur, dit la punaise, en transperçant frénétiquement son voisin.
Excuse-moi, c'est une erreur, dit le chat, en sortant à reculons de la niche du chien.
Excuse-moi, c'est une erreur, dit la femme à son fiancé, en arrachant son voile de mariée.
Excuse-moi, c'est une erreur, dit le violeur à la gamine avachie à ses pieds.
Excuse-moi, c'est une erreur, dit l'homme à sa femme, le parfum de sa maîtresse flottant autour de lui.
Excuse-moi, c'est une erreur, dit le bourreau, en coupant la tête de l'innocent.
Excuse-moi, c'est une erreur, disent les hommes qui coupent la branche sur laquelle ils reposent.
Excuse-moi, c'est une erreur, je recommencerai pas, maman.
Excuse-moi, c'est une erreur, dit le noir à la blanche, ses mains emprisonnant sa poitrine de nacre.
Non, ne t'excuse pas, mon amour. L'erreur, c'est eux. Laisse tes mains gommer ma peur, laisse courir tes doigts d'ébène sur l'ivoire de ma peau. C'est si beau, le noir et le blanc. Des imbéciles disent qu'en les mélangeant, on obtient du gris... Ils ne savent pas la beauté du contraire. Ils n'osent pas le mélange des genres. Ils aiment, frileusement, petitement, à l'ombre de leurs icônes bienséantes.
Je t'aime. Viens.