La tête et les jambes (Lorraine)
La surprise est de taille. Non, je n’ai pas bu. Pourtant, je vois double, et de travers. Le pavé se dérobe, un pavé de l’ancien temps, robuste, qui s’incline.
Qui s’incline ?.. Oui, dangereusement, à la façon d’un toit, en pente quoi ! Moi je suis sur ce toit, j’essaie de toutes mes forces de garder l’équilibre, je tangue, je chavire, je me redresse, ah j’y suis ! .…Non, pas vraiment. Mes jambes partent toutes seules, elles ont mes baskets, mon survêtement marine, mais où vont-elles, c’est choquant, elles me laissent là et je ne peux plus bouger!
Ou aller sans mes jambes ? Je les vois, fiérotes, hardies, debout sur le toit, sûres d’elles maintenant, marchant à grandes enjambées. Tiens non, je me trompe, elles font du sur-place, comme sur le tapis roulant quand j’étais gosse. Cela m’ennuie d’être un tronc, n’importe qui peut m’attraper à bras-le-corps et me déposer où il veut. Quelqu’un pourrait-il les arrêter, s’il vous plaît ? Oui, vous, docteur. Que dites-vous, je ne vous entends pas.
- Voici l’ambulance. Je crains qu’il ne soit trop tard, le chauffard ne l’a pas raté. Il est dans le coma…