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Paroles Plurielles
8 septembre 2007

Un morceau du ciel (Isabel)

L'horloge indique vingt-deux heures trente, mais elle est en avance...

Il ne sera pas là avant trois minutes. Je m’installe à regret sur le matelas posé à même le sol, dans l’angle du mur.

Je place la cagoule de tissu noir sur ma tête, elle n’a pas d’ouverture pour les yeux.

J’attends.

Plus qu’une minute et je vais entendre ses pas. D’abord lointains et presque légers, puis lourds et sourds.

Il va d’abord prendre son trousseau de clefs suspendu à sa ceinture.

Dés qu’il aura déverrouillé la porte, il l’entrebâillera, glissera son bras, éteindra la lumière.

Il allumera sa lampe de poche qui m’aveugle même à travers le tissu.

Je resterai prostrée, les jambes repliées sous le menton, les bras les serrant très fort.

J’attendrai qu’il récupère le plateau repas, qu’il ouvre de nouveau la porte, pose le plateau sur le palier, se retourne, allume la lumière et verrouille la porte.

J’attendrai les yeux fermés, transie de froid, de peur que ses pas sourds s’éloignent et ne deviennent plus qu’un murmure.

Dans cette pièce il n’y a qu’une ouverture à bien 1m80 du sol.

Heureusement elle a des barreaux.

Une caisse en bois me permet d’y accéder. Je ne peux pas directement voir le ciel, mais le bâtiment en face possède deux lucarnes, ce sont mes yeux vers l’infini.

Grâce aux barreaux, je peux me hisser et contempler ce reflet de ma liberté.

Je ne vois plus que le ciel dans ce regard, les nuages qui passent, quelques fois un oiseau, mais la vision est fugace. Je me sens mieux aussi, je vois bien que tout continu, cela me rassure, je sens bien que je ne suis pas seule.

Je ferme les yeux et ouvre mon esprit, c’est alors que je pars, ça y est, moi aussi je vole, je n’ai pas besoin d’ailes, je suis devenue un souffle !

Je suis le vent, léger et joueur. Je suis le vent doux et chaud. Je sens sa caresse qui me porte, qui m’entoure, je suis le vent qui me soulève, je pars !

Loin d’ici.

J’entends ses pas dans le couloir.

Je replie mes jambes.

Je ferme les yeux.

J’attends.

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Commentaires
V
Que dire aprés tous ces commentaires flatteurs?<br /> Les miens seront ternes à coté...<br /> <br /> J'ai aimé ce texte. <br /> Moi aussi, comme Julliette, j'ai pensé à Ingrid!
B
pas de souffrance, l'économiser. L'attente suffit. <br /> beau texte
K
J'aime le rythmne de ton texte. <br /> La souffrance n'est pas explicitement exprimée: nul besoin, nous l'entendons.
C
J'aime beaucoup aussi. Difficile de passer derrière tous ces commentateurs enthousisqstes... Mais ce aui m'asans doute le plus séduit, c'est le rythme, mené par l'alternance sensations visuelles (virtuelles), corporelles, affectives. Bravo Isabel et merci pour ce moment de lecture
I
Bonjour, <br /> Merci à vous, ce voyage vous a plu... j'attends avec impatience vos textes pour une nouvelle<br /> escale dans l'imaginaire !
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