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Paroles Plurielles
5 novembre 2007

Tata Gâto (Cassymary)

Tante Babette prit une longue inspiration. Juste au moment où  l’horloge sonna 2 fois. C’était le signal.

«Allez Jojo, c’est l’heure»

Je déverrouillai alors la porte et eu à peine le temps de me précipiter derrière le comptoir. Ma tante, sourire aux lèvres, regardait les visages enjoués de tous les gamins qui entraient.

Il faut dire qu’il y avait de quoi être émerveillé par  les trésors accumulés dans ces quelques mètres carrés.

Le jeudi, il n’y avait pas classe. Avec elle, je me levais aux aurores, et c’est dans une cuisine rutilante, que nous commencions dans la bonne humeur nos préparations.

L’arrière boutique contenait encore des sacs de farine, de sucre et des bombonnes de lait. En ces temps de guerre, les réserves baissaient à vue d’œil, mais tante Babette regorgeait d’imagination. Alors on pétrissait, on malaxait, on rajoutait de l’eau de fleur d’oranger, et puis on enfournait dans le four à bois où mon oncle préparait son pain. Le boulanger mobilisé, la boulangère s’était transformée en tata gatô, comme la surnommaient  les gamins du village. Et le jeudi, c’était leur jour.

On avait entassé les biscuits encore tout chauds sur les étals. Tante Babette avait ressorti toute sa collection de boites à gâteaux qu’elle avait placées sur les étagères, derrière le comptoir. La décoration était du plus bel effet, et qu’importe si les boites étaient vides.

La petite boutique de tante Babette, c’était mieux que la caverne d’Ali Baba. Elle regorgeait de trésors, des boîtes aux couleurs pastel, des jaunes, des verts, des bleus ciel. Et puis  des douceurs à déguster qui sentaient bon le sucre chaud et l’amour que tante Babette parsemait de ses doigts agiles sur la pâte  malaxée quelques heures plus tôt.

Sur la boutique, un écriteau : ADULTE INTERDIT LE JEUDI

Sur les étals, des étiquettes : 2 gâteaux = 1 demi centime, ou 2 boutons, ou 3 billes.

Le jeudi, tout était permis et la boutique ne désemplissait pas.

«Jojo, n’oublie pas de rendre la monnaie» Et tante Babette riait.

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Commentaires
P
Une jolie façon de faire oublier aux enfants les rigueurs de la guerre. C'est charmant et bien écrit, bravo !
S
jolis souvenirs d'enfance, j'ai bien aimé.
B
j'aime bien que cette tante Babette ait changé de place par rapport au comptoir, et qu'elle soit une drôle de marchande
C
tout simple, tout beau<br /> Quand les enfants sont rois...
M
Un beau texte plein de générosité !
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