Un doux exhutoire (Virgul)
Tante Babette prit une profonde inspiration.
Tant de souvenirs lui remplissent la tête et dessinent un sourire hésitant sur ses lèvres.
C’est le contraste entre les mille joies passées et la triste fatalité du présent qui font trembler son regard. Une larme avortée lui brouille la vue, dans un mirage trouble où l’acceptation ne parvient pas encore à effacer l’immense chagrin.
Cela fait deux jours et deux nuits que Babette mélange œufs, farine, sucre. Pétrit la pâte, remplit les moules, enfourne et entrepose. Une obsession, jusqu’à l’épuisement.
Deux jours et deux nuits que Babette revit les espiègleries de votre enfance, les fou-rires et les émois de votre jeunesse, la longue et heureuse complicité que vous avez toujours partagée.
Deux jours et deux nuits d’excès, comme ceux où tu l’entraînais parfois, Babette la sage et toi l’imprévisible, son amie de toujours, son autre.
Aujourd’hui, dans sa vitrine, Babette a remplacé les tartes et les gâteaux par ces centaines de biscuits, ronds, moelleux et dorés, qui te rappellent et portent ton nom. Oh Madeleine comme tu lui manques !