Une rupture (Joe Krapov)
Quelque part j'ai envie de dire que ce n'est pas très nouveau. Il faudrait être handicapé mental pour ne pas asséner pareilles frappes chirurgicales dans cette fourmilière sclérosée. 140, ça paraît bien. Ca entre tout à fait dans mon projet professionnel. Au niveau du vécu, avec mon prédécesseur qui a échappé à l'espace
carcéral, ça devrait le faire. Pas de souci. C'est le moment, c'est l'instant pour bouger les lignes.
Par contre il ne faut pas que ce soit récurrent. Il y aurait alors, effectivement, un danger de clivage. Donc 172, c'est sûr, y'a pas photo, ce ne serait que du bonheur, du bonus plein le double dévédé, du super-cadeau dans le paquet de Bonux. De toute façon, il faut bien ça pour me remettre en selle. Intrinsèquement je sens bien que j'ai besoin de salons de massage, de plaisir et de rapports intimes plutôt que, disons le clairement pour mieux en rire, d'exclusion et de handicap économique.
Bon, allez, assez tergiversé. Point barre. Trop c'est trop ! Je me lance.
- Mesdames et messieurs les membres du Conseil d'administration, je vous demande de bien vouloir m'accorder une augmentation de salaire de 172%. Qui est contre ?
- ...
- Qui s'abstient ?
Une toute petite voix s'élève alors.
- Euh. Oui mais non.
- Oui, Lefrançois ?
- C'est-à dire qu'avec la conjoncture on se perd en conjectures sur la façon de faire la jointure avec nos joints ventures, alors si d'aventure la menace de faillite liée à la crise des subprimes.
- Je ne connais de subprimes qu'à la vache haletante ! (à part : quel thon, celui-là !)
- Vous voulez dire allaitante, M. le Président ?
- C'est celààààà, oui.
Il regarde Mme Lorraine d'un mauvaise oil et pense : Quelle quiche, celle-ci !
- Pas d'autres commentaires ? Eh bien je vous remercie d'avoir pris sur vous pour voter cette décision difficile. Maintenant si vous voulez bien, nous allons aborder le point 2 de l'ordre du jour. Dugland, où en est-on de notre OPA sur Eurodisney ?
Le reste de la réunion est « off the record ».