7. La charge de la fonction (Kiki)
C'est étrange, depuis que je ne travaille plus, je me sens de plus en plus fatigué.
Il y a de plus en plus de monde aussi.
J'ai du mal à aller d'un endroit à l'autre sans me faire bousculer. Les gens sentent mauvais. Et il y en a partout !
Il faut faire la queue, sans cesse attendre son tour, un instant Monsieur, veuillez patienter, un instant, prenez un numéro, ne quittez pas…
Quand j'étais jeune...
Les prisons étaient bien moins pleines. Les rues aussi, sans doute. Je me déplaçais sans efforts. Il faut dire que mon uniforme en imposait. Les badauds se poussaient, s'écartaient de mon chemin, comme des petits poissons quand le requin avance. J'allais du point A au point B sans ralentir ni céder le passage. J'étais respecté.
J'étais vif à l'époque. Et je travaillais bien. Personne, jamais, pour se plaindre de mes services. Encore moins les victimes.
C'est l'inaction qui est déprimante.
Peut-être devrais-je partir en voyage, voir du pays, et, pourquoi pas, retrouver du travail à l'étranger ?...
Bourreau, c'est un sacerdoce.
Ma cagoule prend la poussière dans le tiroir de la penderie. Quelle tristesse.
C'est fou comme les Droits de l'Homme peuvent causer du tort.