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Paroles Plurielles
3 juin 2008

34. Mauvaise anticipation (Vertumne)

Je sors du garage avec une épouvantable migraine. Elle, à l'autre bout de la ville, elle enfonce la vitrine d'une pharmacie avec son 4x4. Dans une heure, on doit se rencontrer au parc pour…
À nouveau, le bouquin lui tomba des mains, mais définitivement cette fois-ci. « Décidément, il s'écrit n'importe quoi » pensa-t-il, en se mettant à regretter son achat. Bon, il devait quand même admettre que ce n'était pas le livre, qu'il avait choisi en priorité – Huile de vendange, d'Ursule Trianon –, mais plutôt les trois jolies petites poupées délivrées en supplément avec le bouquin. Ce serait parfait pour ses nièces, il ne savait jamais quoi leur offrir quand il allait rendre visite à sa sœur…

Effet pervers du crépuscule de la littérature. Peu à peu, les librairies avaient disparu les unes après les autres, le livre avait totalement déserté les écrans de télévision, le critique était un genre en perdition puisqu'il n'avait pratiquement plus rien de solide à critiquer, les rares livres qui paraissaient encore se trouvaient prisonniers de leur emballage plastique, s'empilant à l'étalage de quelque épicerie ou quincaillerie, on ne prenait plus la peine de rédiger une quatrième de couverture, aussi ne savait pas vraiment ce qu'on allait lire, on encourageait leur achat en l'accompagnant d'un jouet, d'une pièce d'outillage, d'un appareil électro-ménager (à moins que ce ne fût l'inverse: offrir un livre – ou ce qui en faisait encore office… – à l'achat d'un ustensile de cuisine ou d'un accessoire de camping). De leur côté, et pour préserver leurs trésors, les bibliothèques ne prêtaient plus les ouvrages qu'elles conservaient précieusement, n'en autorisant la lecture que dans des locaux blindés et truffés de caméras.

Huile de vendange… Le titre, pour curieux qu'il était, lui avait plu. Bon, il s'était trompé, il n'allait pas en faire toute une histoire. De toute façon, il n'aurait pas pris J'ai retrouvé le temps perdu, de Raymond Croust, il était offert avec une cafetière italienne, et il en avait déjà trois à la maison…

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Commentaires
A
Excellent, mais effrayant...<br /> Comment diffuser la lecture, sans en faire un produit de masse de qualité médiocre... voilà le défi non?
I
astucieuse usage de la consigne pour une chute qui m'a fait sourire ... jaune
N
J'aime l'originalité avec laquelle tu as su rebondir sur la consigne.
C
oui! c'est excellent Vertumne...mais cela fait froid dans le dos
R
et ben ça fait froid dans le dos,,,, <br /> mais c'est juste un cauchemar !<br /> ... par contre<br /> "il était offert avec une cafetière italienne, et il en avait déjà trois à la maison"<br /> je vais lui donner l'adresse de mon docteur pour le sevrage !!!!<br /> <br /> un très bon texte
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