03. Main lourde sur jambe légère (RV)

7 mars 2008

03. Main lourde sur jambe légère (RV)

Dans mon pays, on ne badine pas avec les sanctions pour les automates. Passe encore pour les modèles certifiés Suisse 17e siècle, vieille aristocratie voyez, eux, bon, on a beau avoir fait la Révolution, ils ont toujours des privilèges. Mais pour les Standards, comme ils disent au ministère, pour les Séries, quoi, les modèles industriels, pas de demi-mesure. Et même pour des modèles uniques sur commande comme moi, bichonnés des heures à la main, la justice a la main lourde.

Un coucou enroué, bannissement du chalet. Un couac au carillon de Béthune et vous vous retrouvez à rythmer l'ouverture de la porte dans une pharmacie. Un faux-pas de danse dans une chorégraphie de danseuses à jambes légères... hé oui, là, c'est bien mon cas.

Je ne sais pas exactement ce qui m'a pris, une distraction venue du public, un éclat de lumière imprévu, j'ai raté mon pas. Patatras. Vingt-six danseuses, accessoires et consorts au tapis. Un mécanisme jusque là sans histoire, plutôt apprécié de la clientèle, qui pourtant en a vu d'autres avant nous, car on est situé dans la dernière salle du musée.

Et moi, influençable comme je suis, j'ai laissé mon avocat plaider l'erreur provoquée par autrui. J'ai pris le maximum requis : cinq ans de mannequinat statique, en réserve en plus, sous les combles du musée. Si encore j'avais présenté des excuses, imploré la clémence, cillé comme une biche, je m'en serais sortie avec un avertissement, au pire une semaine de retouche-peinture, ou une mise à l'arrêt avec sursis. Mais non. J'ai voulu du grandiloquent. Il n'avait pas tort, ce petit procureur, de me lancer en sortant :

"C'est comme ça qu'on perd un procès !"