Yvette et les coqs (Amanda)
Le samedi, c'est plus tranquille, il y a moins de monde.
En fait, il n'y a plus personne.
Tous envolés, partis se reposer à la campagne...
Ou alors prolongeant un séjour de travail par un week-end tous frais payés...
Yvette passe le samedi et le dimanche à la caravane avec ses deux petits.
Cela lui fait des vacances même si elle en profite pour faire les lessives de la semaine.
Elle a de la chance, Yvette.
Heureusement qu'il y avait l'assurance.
L'assurance qui lui a fourni l'argent.
C'était l'année passée.
Quand René, son mari, chauffeur routier s'est tué.
Elle a de la chance Yvette.
D'avoir au moins cela, une résidence secondaire en quelque sorte.
A la Mer du Nord.
Oh ! Pas à Knokke-le- Zoute !
Dans un coin tranquille, dans les dunes, au Coq.
Très joli, Le Coq sur mer.
Comme c'est romantique, Yvette !
Cela la change un peu.
Des coqs en pâte...
D'habitude, c'est au boulot qu'elle les croise.
Tous ces petits coqs montés sur leurs egos qui se prennent pour Sarko.
Yvette est femme de ménage à la Communauté Européenne à Bruxelles.
Dans ce grand machin appelé " Le Caprice des Dieux ".
Sans doute parce qu'ils ont laissé à l'infini des vitres à nettoyer...
La Communauté !
Au début, Yvette croyait naïvement que cela voulait dire tous égaux, tous frères, tous dans le même panier.
Salaire égal, travail égal.
Sauf pour les femmes de ménage que l'on ne ménage point.
Les autres avec leurs diplômes et leurs examens sont bien installés : à vie.
Même les Polonais !
Pas Yvette : intérimaire qu'elle est.
Mais elle a de la chance quand même
De vivre parmi les coqs.
Elle a de la chance, Yvette !
Imaginez : elle aurait pu croiser de jeunes loups aux dents longues !
Elle aurait pu être au sein d’un nœud de vipères !
Mais ici, il n’y a que de des fourmis laborieuses.
La communauté est une ruche bourdonnante.
Elle a de la chance, Yvette !
De la chance, vraiment !