Le soir du match de la Lazio (Elvire)
Je suis restée une heure environ dans la salle de bain. La buée sur les vitres et la moiteur sucrée pour m’empêcher de penser. Penser ces dérives et ces accotements qui parfois nous chavirent.
Je n’étais pas seule, dans la salle de bain. Tu étais là, et je devais encore vaciller contre toi. Tout comme la flamme de ces chandelles, vaciller, souffleter. Tu t’en souviens, bien sûr, nous étions partis pour quatre jours. Quatre jours à Rome comme une fuite. Je me rappelle les bruits de la rue et les cris, et puis, soudain, ce silence à la nuit tombée. Ils avaient tous posé leurs piaggios contre les murs de la venelle pour aller voir le match au café du coin. Un match de la Lazio. En rentrant, ce soir là, après cette douce journée de partage et de vertiges, tu avais écrasé ta canette de Coca au bas de l’hôtel. C’était le quatrième jour. Tu nous a fait couler un bain chaud. Nous nous sommes lovés dans l’eau brûlante. Nous avons dû rêver, sans doute …
Je ne sais pas ce qui s’est enfui alors. J’ai entendu les cris des supporters en bas, un but. J’ai retrouvé le geste de ta main pressant la canette vide. Je me suis vue, moi, les mains sales et le corps englué.
Plus rien à dire. Des mains noires de suie et aucun moyen d’effacer ça. Jamais.
Je suis restée environ une heure dans la salle de bain. Au bout de cette heure là, le soir du match de la Lazio, je ne t’aimais plus.